Percevoir linvisible pour defendre la profession

FigureFigure

Cet article marque la fin de ma première année en tant que directeur général et chef de la direction du Collège des médecins de famille du Canada (CMFC). Je savais que ça n’allait pas être facile, et ce fut en quelque sorte un baptême de feu. Cette première année au poste de chef de la direction m’a rappelé mon premier stage clinique à la faculté de médecine, en obstétrique. En raison d’une série d’événements inhabituels, dont l’absence de la plupart des résidents, j’ai dû accoucher plus d’une douzaine de bébés lors de mon premier quart de travail. Je ne me souviens pas d’avoir déjà assisté à un accouchement auparavant. Les infirmières en obstétrique ont passé la soirée à s’occuper de moi et de leurs patientes. Mon superviseur obstétrique avait besoin de mon aide, car il était affairé avec des césariennes, tout en sachant que j’étais en état de choc. « Quoi qu’il arrive ce soir, reste calme, m’a-t-il dit. Les gens vont paniquer et ils auront besoin de ton attitude calme. » J’ai dû me répéter cette phrase une centaine de fois cette soirée-là. Ma première année à la tête du CFMC s’est déroulée de la même façon : j’ai éteint des feux, tentant de rester calme, en m’appuyant sur les autres et en tirant des leçons de chaque situation.

La leçon la plus importante que j’ai apprise dans mon rôle de chef de la direction est que je ne comprenais pas l’ampleur et la profondeur du travail effectué par le CMFC pour soutenir ses membres. Pendant des années, même avant d’occuper ce poste, j’ai entendu des membres réfléchir à voix haute : « Qu’est-ce que le CMFC a fait pour moi? » Au cours de mes 10 premières années de pratique, je pense que je me suis aussi posé cette question. Je crois que deux aspects mènent à ce malentendu.

D’abord, une grande partie des offres du CMFC intéresse quelques médecins, mais pas nécessairement une grande majorité, ou cette donnée est tout simplement inconnue. Récemment, l’un de nos dirigeants m’a parlé d’une interaction avec un membre qui avait suggéré que le CMFC célèbre notre corps enseignant et les apprenants. On lui a expliqué que c’est ce que le Collège fait au cours du souper annuel de la Section des enseignants, de la collation des grades et du souper du gala. Je ne condamne en rien cette méconnaissance. Je n’étais même pas au courant de l’existence des prix ou du gala jusqu’à ce que j’en sois récipiendaire. Là est le défi du CMFC, qui offre une foule de services utiles, comme Le Médecin de famille canadien, les groupes d’intérêt des membres, les Outils pour la pratique, lignes directrices simplifiées, la cérémonie de collation des grades et de remise des prix, et bien plus encore. Environ 67 % des membres du CMFC lisent leurs courriels sur les Outils pour la pratique. Compte tenu de la vaste gamme de services qu’offre le CMFC, la plupart des membres y trouvent leur compte, même à leur insu. Le CMFC doit travailler sur ce point et en faire une priorité.

Le deuxième aspect de la valeur pour les membres est moins tangible et peut-être même invisible, mais c’est le seul qui profite à tous les membres. Le maintien de nos normes, grâce à l’agrément, aux examens et à la certification du perfectionnement professionnel, est l’aspect vital de notre profession et de son autoréglementation et soutient, préserve et protège la médecine de famille. Mais notre profession est-elle vraiment en péril? En un an, j’ai eu des discussions sur le remplacement des médecins de famille par des professionnels paramédicaux, sur la durée de la formation passant à un an, sur la limitation de la nature globale des soins fournis par les médecins de famille et même sur la fin de notre autoréglementation. Le travail sur les normes préserve l’autoréglementation de notre profession et est le pilier du travail de plaidoyer du CMFC pour la médecine de famille. Il s’agit de la chose la plus importante que nous faisons pour nos membres.

Lorsque nous luttons pour la profession, que nous affirmons notre pertinence face à d’autres organisations médicales, que nous faisons pression sur les gouvernements pour qu’ils investissent dans la médecine de famille, ou que nous rappelons au public la valeur de notre profession, nous misons sur la force du travail de normalisation du CMFC et nous défendons les principes d’autoréglementation de la profession.

J’ai aussi appris les rudiments financiers du CMFC et que, pour continuer notre travail, nous devons stabiliser notre budget. Les frais d’adhésion au CMFC n’ont pas changé depuis 2017, malgré une hausse de l’inflation de plus de 25 %, mettant en péril la santé financière du Collège. L’an passé, nous avons réduit les effectifs et les programmes afin de réagir à cet enjeu financier. L’inflation entraînant une hausse des coûts, nous devons rajuster les frais en conséquence, sinon le CMFC continuera sa diminution jusqu’à disparaître. Sans organisation nationale pour nous représenter et nous défendre, nous pourrions aussi perdre nos normes professionnelles et notre autoréglementation. Toutes nos modalités de travail pourraient être soumises à un contrôle gouvernemental complet. Notre organisation doit être stable pour être en mesure de préserver la médecine de famille.

L’avenir de notre profession n’est pas garanti si nous ne la défendons pas. Cela peut sembler inconcevable, mais après un an en fonction, je peux vous confirmer que la réalité des risques pour notre profession est l’une des leçons les plus ardues que j’ai apprises.

Copyright © 2025 the College of Family Physicians of Canada

Comments (0)

No login
gif